Au Docteur Danièle Ranoux
Service de Neurologie,
CHU Hôpital Dupuytren,
2 Avenue Martin Luther King 87042 Limoges


Chère Madame,


J'ai appris par un de vos patients de la région parisienne que vous expérimentez le traitement des céphalées de tension chroniques, par le Botox (la toxine botulique) au CHU de Limoge.

Personnellement, je souffre de céphalées de tension chroniques depuis 26 ans.

Je confirme que _ tel que je ressens chaque jour mes céphalées _ celles-ci apparaissent comme des contractions des muscles du/au pourtour de mon crâne, des contractions sur lesquelles
je n'ai strictement aucune prise psychologique (elles sont hors de tout contrôle), que cela soit par les techniques de relaxation (training autogène, yoga ou l'hypnose ...).

Je suis ingénieur informaticien système Solaris et je travaille sur des technologies informatiques très complexes ... et dans un milieu sans cesse assez stressant (°) ...

Pour mon travail, j'ai besoin sans cesse de toutes mes capacités intellectuelles.
Or quand mes maux de tête sont forts, je suis complètement abruti par ceux-ci et il m'est incapable de me concentrer, de raisonner, de réfléchir.
C'est un handicap très sérieux pour le maintien dans mon emploi.
Plusieurs fois dans le passé, j'ai perdu mon travail, à cause de ces maux de tête permanents, voire à cause du découragement qu'ils provoquent.

Or le corps médical m'apporte aucune réponse positive à mon problème et le problème de la majorité des patients, qui sont dans mon cas (et pour leur handicap ... souvent très sérieux).
La majorité des neurologues _ sensés être spécialistes des céphalées de tension chroniques _ depuis les années 60, ne jurent que par le Laroxyl et l'amitryptiline (principe de base du Laroxyl), voire par le Rivotril et les anti-épileptiques (psychotropes).

Dès le départ en 81, dès que mes céphalées sont apparues, on m'a traité au Laroxyl, jusqu'à 75 mg par jour ... En 2 mois, d'augmentation constante des doses, j'ai vu
mon état d'abrutissement, de somnolence s'accroîtrent sans cesse, sans qu'un seul instant, ma douleur ne diminue ...

J'ai d'ailleurs constaté, déjà lors de cette première expérience du corps médical face à mon problème, que quand le traitement prescrits par ces neurologues est tenu en échec par mes céphalées, alors ils mettent très rapidement la persistance de ma douleur sur des causes hypocondriaques (ou plus rarement sur une hypersensibilité anormale à la douleur).
Si le traitement ne marche pas, ce n'est jamais la faute du traitement, mais toujours celle du patient.

D'une manière générale, les neurologues ne nous croient pas quand on leur dit :

a) que leurs traitements à base de psychotropes ne marchent pas (en tout cas, dans mon cas),
b) que la douleur est vraiment réelle, forte, de gênante à extrêmement gênante, voire accablante, empêchant de réfléchir, de se concentrer, d'avoir un sommeil réparateur (de pouvoir dormir profondément) ...

Un neurologue parisien très connu m'a même affirmé que mes céphalées de tension sont 1000 fois moins douloureuses que des algies vasculaires de la face. Et face à ce genre d'affirmation non scientifique, nous ne pouvons pas nous défendre. C'est son opinion, mais je confirme que mes céphalées peuvent-être extrêmement douloureux, et de toute façon, en moyenne toujours gênantes intellectuellement.

Je suis de formation scientifique très poussée (BAC + 7, 2 diplômes d'ingénieur INSA & INSTN, 2 DEA en physique + ais fait une thèse expérimentale en physique des plasmas).
Et à force de lire des articles sur le sujet, j'ai l'impression que bon nombres d'articles "fondateurs" avançant les succès de l'amitryptiline, ont été "bidonnés" (que cela soit a) avec des échantillons statistiques réalisés sur moins de 30 individus, b) avec une totale absence de suivis du traitement à long terme sur plusieurs années ...), ce genre d'études étant, me semble-t-il, "poussées" (et orientés dans un certains sens) par les grands laboratoires pharmaceutiques (ceux justement qui diffusent ces psychotropes ...).

En fait, la plupart des membres de l'association "Papillons en cage" sont très "mitigés", voire fort "réservés" face aux traitements de leurs céphalées, par les psychotropes, surtout lorsqu'ils sont prescrits à haute dose ... Une seule personne nous ayant contacté, nous a affirmé que le Laroxyl c'était super ... cette personne était le fils d'un grand psychiatre de l'hôpital Necker à Paris ... Cette personne était vraiment un cas unique.

J'ai été à l'origine de l'association "Papillons en cage" pour le soutiens aux patients souffrant de céphalées de tension chroniques, pour tenter de trouver une issue à l'impasse médicale dans laquelle est enfermé la plupart de nos membres , depuis des dizaines d'années.

Une piste qui nous a semblé séduisante et sérieuse était le Botox ... (qui me paraît une piste très logique si l'on admet que la douleur que nous ressentions est causée par la contracture douloureuse _ voire la tétanisation automatique _ de nos muscles péri crâniens).

Or après peu d'essais, le traitement par le Botox a été très vite critiqué, voire décriée, dès les années 2000, surtout par ces mêmes neurologues qui prônent le traitement par les psychotropes ...

Pour nous, c'est comme si l'on nous fermait notre dernière issue, notre dernier espoir, de nous en sortir un jour ...

Or tel que j'ai analysé tous les articles parus sur le sujet (°), j'ai constaté qu'il n'y a souvent aucune persévérance dans le fait de pousser leurs recherches à fond sur les traitements par le Botox, surtout par ceux qui prônent le traitement par les psychotropes ... Et quand le Botox marche, il mettent alors cela sur un supposé effet placebo ... (On trouve même des articles de test en double aveugle qui donne des résultats opposés !!!).

Je pense plutôt que si leur traitement ne marche pas, c'est que notre douleur est beaucoup plus forte et rebelle que ce qu'ils l'imaginent.

 

Deux neurologues connus de l'hôpital Lariboisière, responsable du service "Urgence céphalées" m'ont affirmé que :

 

1) le Botox ne marchait pas (ou n'était pas probant) (!),

 

2) que je ne prenais pas leur traitement à base de Psychotropes, ils ne pouvaient [plus] rien pour moi.

 

3) que notre maladie (céphalées de tension chroniques sur plusieurs dizaines d'années) ne serait jamais reconnu par le corps médical comme un vrai handicap

 

Or pour moi, il est impossible :

 

1) qu'il ne puisse pas y avoir (qu'il ne puisse pas être découvert un jour) un traitement qui puisse enfin marcher totalement un jour pour nos céphalées de tension chroniques (la science trouve toujours des solutions un jour à toutes les maladies !),

 

2) que notre mal soit de type hypocondriaque (car la douleur est vraiment réelle et régulièrement forte, en tout sa suffisamment forte pour nous perturber durablement dans notre activité professionnelle).

 

Malgré l'hostilité ou le désintérêt de la majorité des neurologues en France face au traitement par le Botox, nous vous informons que notre association soutient vos essais cliniques... même si un de vos patients _ que je connais et qui m'a parlé des vos essais cliniques _ n'a pas obtenu pour l'instant les effets ou résultats qu'il espérait...

 

Nous pensons qu'il faut encore approfondir les recherches.

Personnellement, je pense que notre douleur et gêne (quand sont très fortes) sont largement ou très largement sous-estimées par les neurologues français...

 

Et j'aurais donc tendance à croire (ou tout cas, tels que je ressens mes céphalées), qu'il faudrait injecter le Botox :

 

1) si possible, dans les zones les plus douloureuses, entourant notre crâne (ou celles à l'origine de notre douleur),

 

2) à des doses plus élevées que celles prescrites actuellement ...  (peut-être faudrait-il une centaine d'injections à chaque séance, par micro-injections (comme dans le cas d'une mésothérapie avec un certain type de casque permettant une dizaine ou une centaine de d'injections à la fois (?) ...), au lieu de 3 ou 4 injections par séance.

 

3) en essayant de mieux repérer les muscles activés et mis en jeux dans la genèse de la sensation douloureuse, et les vaisseaux sanguins à éviter  _ par exemple, avec une caméra thermique ou d'autres moyens d'explorations fonctionnels péri-crâniens (EMM électromyogrammes pour visualiser les zones musculaires péri-crâniens  ... ainsi que l'utilisation d'un produit de contraste pour visualiser les vaisseaux sanguins à éviter ... ).

Ce ne sont que des idées ...

 

Mais si votre recherches débouchaient sur des résultats (nettement différentes de résultats placebo obtenus en double aveugle), je peux vous affirmer qu'ils rendraient énormément service à des patients, de notre associations, qui souffrent terriblement depuis des dizaines années, et pour lesquels le corps médical reste totalement impuissant face à leur cas (voir par exemple, un mail de ces patients ci-joint (+)).

 

En tout cas, merci pour tout ce que vous faites pour les patients souffrant de céphalées de tension chroniques.

 

Veuillez agréer, Madame, l'expression de mes respectueux sentiments,

 

Benjamin LISAN

Président de l'Association Papillons en cage

Tél.: 01.42.62.49.65 / 06.16.55.09.84 / 06.03.80.55.66

Association Papillons en cage : http://www.cephaleesdetension.co.nr 

(+)                                          http://membres.lycos.fr/cephaleesdetension

Futur site                                http://papillonsencage.chez-alice.fr

(+) Association Française de Soutien aux Personnes Souffrant de Céphalées de Tension Chroniques.


(°) Voir articles sur le sujet dans une des pages du site Web de notre association :
http://benjamin.lisan.free.fr/AssoLutteContreCephalee/DocsTraitParBotox.htm

Dont l'article :

k) Botulinum for Tension Headaches - Does It Do Any Good ? : A Viewpoint, From Charles P. Vega, MD, FAAFP (09/12/2006)
Cephalalgia.
2006;26:790-800,

Source : http://www.medscape.com/viewarticle/544117  
Traduction Française : Le Botox pour les céphalées de tension : fait-il du bien ? Un point de vue 

Note : Des études d'Allergan Inc (société pharmaceutique producteur de Botox) sur l'utilisation de Botox pour les céphalées de tension se sont révélées décevantes. Charles P. Vega, analysant ces études négatives, constate que 1) les points d'injections du Botox ont été fixes et non guidées par le patient, 2) que l'on a autorisé certains patient à continuer à prendre leur médication habituelle, pendant le traitement par le Botox ....

(°) ne serait-ce que par la mise en concurrence permanente de mon équipe informatique (d'une SCSI) avec d'autres équipes informatiques d'autres SCSI (sociétés de conseils et services informatiques). On peut perdre notre place à tout instant, ce qui est stressant. Et à 52 ans, il m'est difficile de changer de métier et de voie professionnelle, pour des métiers des voies professionnelles moins stressantes... J'ai tenter de le faire entre 2002 et 2006, sans résultat, et je me suis retrouvé au RMI et au chômage de longue durée... sans aucune compréhension de l'ANPE pour mon cas.

 

PS. Je voulais ajouter une petite précision à mon mail d'hier, envoyé à votre attention :

 

Certains de nos membres étant dans une situation (sociale, professionnelle et morale...) très critique vis-à-vis de leurs céphalées de tension chroniques (dont certains depuis plus de 20 ans), je pense que quelques patients de notre association (dont moi-même) _ en tout cas, ceux dans une situation des plus critiques _ seraient prêts _ même s'ils ressentent, pour la plupart, une certaine crainte face au traitement par le Botox  _ à expérimenter, à essayer voire à être cobaye, dans le cadre d'un protocole de traitement par le Botox.

 

PS2. Ci-joint, au cas où il pourrait vous être utile, un article sur le traitement par le Botox envoyé par un de nos membres : Managing chronic headaches (du site World Headache Alliance) (Copie de cet article, avec sa traduction française, sur le site de l’association « Papillons en cage »).

 

(+) Copie d’un mail d’une patiente souffrant terriblement de céphalées de tension chroniques :

-----Message d'origine-----
De : n…
Envoyé : jeudi 8 mai 2008 18:51
À : benjamin.lisan2@aliceadsl.fr
Objet : Re: Un point sur notre situation (à nous céphaleux de tension chroniques)


Cher Benjamin,

 

Mon silence sur Internet en dit long... espoir, rechute, espoir, rechute... trois petits tours et puis s'en vont !!!!!

Je suis comme une marionnette, je donne le change sur le théâtre de cette vie faite de promesses (tu n'auras plus mal, tu ne seras plus fatiguée) et de désespoir (on t'a eu, t'es foutue!)... même pas le courage de faire un autre bébé, trop épuisée par ce mal que je combats chaque jour. Je vis avec cette douleur lancinante.....................

 

Bon courage et à bientôt sur le net de la douleur!

 

Nora... une amie.