Œillères politico-religieuses

 

Par Benjamin LISAN, le 29/09/2021

 

L’histoire de l’humanité est remplie d’exemples d’aveuglements et d’œillères politico-religieuses, de tendresses ou de complaisances coupables, voire de complicité envers des idéologies meurtrières, des régimes ou systèmes idéologico-religieux criminels, féroces et/ou barbares …

 

La liste de ceux qui ont souffert (ou souffrent toujours) d’œillères idéologiques est longue. On y trouve, par exemple :

 

·         Le philosophe Alain Badiou (connu pour sa défense de l'idéologie et des régimes communistes, notamment ceux de la Chine maoïste et des Khmers rouges cambodgiens),

·         L’écrivain Jean-Paul Sartre (envers le communisme puis le castrisme. « Tout anticommuniste est un chien »),

·         La philosophe et romancière Simone de Beauvoir,

·         Le poète Pablo Neruda,

·         Le poète Louis Aragon,

·         Le philosophe Michel Foucault (envers le maoïsme, durant un temps),

·         Le linguiste Noam Chomsky (relativisant les crimes du régime des Khmers rouges au Cambodge, durant un temps),

·         L'écrivain et journaliste, Alberto Moravia,

·         Jacques Grippa, homme politique belge, communiste pro-soviétique, puis maoïste, puis de nouveau pro-soviétique,

·         L'homme politique français, Jean-Luc Mélenchon, concernant le régime chaviste du Venezuela, le régime castriste à Cuba ...

 

Chez ces militants se laissent emporter, enthousiasmer pour la mythologie et la mystique révolutionnaires (en particulier envers la « révolution culturelle » en Chine), beaucoup étant persuadés que l’on ne peut pas faire la révolution, sans faire couler du sang (« On ne fait pas d’omelette sans cassez des œufs »).

 

Combien d’intellectuels qui courraient et qui courent encore du côté de la girouette, du vent.

 

Combien, dans leur aveuglement, se font abusés par des « voyages Potemkine », organisés en URSS, en Chine communiste, en Albanie, à Cuba etc. (lors de voyages extrêmement contrôlés).

 

Peu de sympathisants ou compagnons de route du communisme ont fait preuve d’esprit critique, hormis :

 

·         L’écrivain André Gide (auteur de « Retour de l’URSS », 1937).

·         Le résistant, déporté, écrivain et homme politique français, militant trotskiste, David Rousset, créateur, en octobre 1950, de la Commission internationale contre le régime concentrationnaire (CICRC).

·         Le journaliste, écrivain, historien, ancien résistant communiste, Pierre Daix, ancien rédacteur en chef de l'hebdomadaire Les Lettres françaises (proche du Parti Communiste Français).

 

Certaines personnes (non communistes) ont aussi apportés leur touche à l’esprit critique envers tous les totalitarismes :

 

·         Le journaliste et écrivain, George Orwell (de son vrai nom Eric Blair), auteur des livres « La ferme des animaux » (1945) et « 1984 » (1949).

·         La philosophe et politologue Hannah Arendt, auteur de l’ouvrage « Les origines des totalitarismes », en 3 tomes, 1951 (totalement traduit en français … seulement en 1990 !).

·         Le philosophe, sociologue, politologue, historien et journaliste français, Raymond Aron, auteur de « L'Opium des intellectuels » (1955).

·         Le sinologue et écrivain Simon Leys (de son vrai nom Pierre Ryckmans), avec son ouvrage « Les Habits neufs du président Mao : chronique de la « Révolution culturelle » », (1971), qui la démystifie.

·         Le philosophe, écrivain et journaliste français Jean-François Revel, auteur du livre « La connaissance inutile » (1988) (sur la paresse intellectuelle et le refus de vraiment s’informer).

·         L’écrivain et journaliste français Jean Sévillia, auteur du livre « Le terrorisme intellectuel » (2000), qui, toute sa vie, a dénoncé les « travers de l’historiquement correct », le manichéisme, par exemple dans l'analyse de la guerre d'Algérie, de la révolution française etc.

 

On constate les mêmes mécanismes à l’œuvre dans le Mouvement woke, la cancel culture, chez les islamo-gauchistes, les décolonialistes, qui tous nourrissent un nouveau mouvement anti-occidental  :

 

·         Réécriture de l’histoire,

·         Désintérêt pour la vérité historique (voire désinvolture) et négationnisme envers elle, qui ne tient absolument compte de la connaissance valable, scientifique, historique (une paresse intellectuelle, un manque de curiosité intellectuelle pour l’histoire exacte, un manque de travail de vérification minutieuse des faits),

·         Intolérance, sectarisme et terrorisme intellectuels,

·         Vision manichéenne, binaire du monde …

 

En raison de leurs préjugés, esprit partisans, aveuglements, la plupart de ces militants se font, d’ailleurs, facilement manipuler et abuser par les fake news (politiques …), les théories du complot …,

 

Chez les islamo-gauchistes, dans leur combat anticolonialiste et antisioniste pour la cause palestinienne, on retrouve aussi le même type d’œillères ou d’aveuglement, qu’on pourrait nommer « œillères islamistes » ou « œillères vertes » _ à l’instar des « œillères rouges » _, le même type de soucis du politiquement correct, envers l’islam, son prophète, leur histoire, les musulmans …

 

Dans leur esprit, un arabe et l’essence profonde de leur identité doivent être nécessairement musulman ou musulmane.

 

Leur soucis du politiquement correct fait qu’ils interdisent qu’un occidental (i.e. un « blanc ») puisse offenser ou blesser les musulmans, dans leur conviction, afin de les « respecter » et aussi en raison de ce que les blancs ont à se reprocher, à cause de la colonisation occidentale.

 

Dans leur esprit, les « musulmans » sont une entité essentialisée (aveuglement sur le fait, qu’il existe pourtant des arabes athées, ex-musulmans, chrétiens …). Selon eux, les « musulmans » sont toujours victimes, 60 ans après, de la colonisation occidentale, et toujours les « damnés de la terre » (c'est-à-dire des victimes perpétuelles), selon le titre du livre de Frantz Fanon, militant anticolonial. Comme si les descendants des colons devaient porter, à vie, la culpabilité de la colonisation (sans possibilité de prescription). Or l’on sait que tous les totalitarismes adorent faire passer leurs croyants pour des victimes et adorent le culte du martyr.

 

Les différentes formes de terrorismes et sectarismes intellectuels (communisme, islamisme, islamo-gauchisme, fascisme, nazisme, indigénisme, cancel culture, mouvements woke, mouvements décoloniaux …) ne datent pas d’hier.

Ils me rappelle, par exemple, l’affaire Thalamas, en France, en 1904 :

 

« Amédée Thalamas est un professeur d'histoire et géographe français. Professeur de l’enseignement secondaire, il a enseigné au lycée Condorcet, puis au lycée Charlemagne et à la Sorbonne. Il a également été directeur général de l’Instruction publique en Indochine. Il fut député radical de Seine-et-Oise de 1910 à 1914.

 

À la suite d'un cours du professeur sur Jeanne d’Arc à une classe de seconde au lycée Condorcet, dans lequel il affirmait que l'héroïne avait été en proie à des hallucinations auditives (et remettait en cause le caractère sacré de la figure historique), le député monarchiste de Paris Georges Berry dénonce un outrage à sa mémoire. Ce cours faisait suite à la publication de son livre intitulé "Jeanne d’Arc, l’histoire et la légende".

 

Selon une lettre en date du 14 novembre de Georges Berry, député monarchiste « rallié » de la Seine, au ministre de l'Instruction publique Joseph Chaumié, le professeur aurait « outragé en termes inqualifiables devant ses élèves la mémoire de Jeanne d'Arc ».

L'intervention du député donne lieu, dès le 15, à des polémiques et des campagnes hostiles dans la presse, à des manifestations, à un débat à la chambre des députés, puis au duel entre Paul Déroulède et Jean Jaurès en décembre 1904. Dans ce contexte, une enquête est ouverte par le ministre de l'Instruction publique Joseph Chaumié. Le 29 novembre, le ministre Chaumié nomme Thalamas au lycée Charlemagne (ne fait, il le déplace du lycée Condorcet au lycée Charlemagne), après lui avoir adressé un blâme, pour avoir manqué de tact et de mesure.

 

En décembre 1908, cinq ans plus tard, l'« affaire » rebondit : Thalamas doit assurer un cours libre en Sorbonne sur la « pédagogie pratique de l'enseignement de l'histoire ». Des incidents éclatent, impliquant notamment des étudiants « nationalistes et royalistes », décidant dès lors d’interrompre, chaque mercredi, le cours. Maurice Pujo, à la tête des Camelots du roi, branche de l'Action française, dirige ainsi les manifestants [Le dirigeant des Camelots du roi est lui Maxime Real del Sarte]. L'Action française fait ainsi parler d'elle et élargit son audience en perturbant les cours, frappant et insultant Thalamas. Le 17 février, à la suite d'une énième perturbation, le cours est annulé » [2][3].

 

Bibliographie :

 

[1] Compagnon de route, https://fr.wikipedia.org/wiki/Compagnon_de_route

[2] Affaire Thalamas, https://fr.wikipedia.org/wiki/Affaire_Thalamas

[3] Amédée Thalamas, https://fr.wikipedia.org/wiki/Am%C3%A9d%C3%A9e_Thalamas

[4] Génération offensée : De la police de la culture à la police de la pensée, Caroline Fourest, Poche, 2000.

[5] Œillères rouges. Complaisances intellectuelles avec les régimes totalitaires de gauche, Hervé Hasquin, CEP Editions, février 2021, 212 pages, 18.50 €.

[6] Historiquement show 423, 25 septembre à 20h, https://histoire.fr/actualit%C3%A9s/historiquement-show-423  

[7] Sur la définition d’une connaissance valable, voir cet ouvrage :

 

Rationalité en philosophie des sciences, Elie Volf, Michel Henry, Editions L’Harmattan, 2018, 240 pages, 25,50€.

 

PS. Certaines personnes, à la places d’œillères intellectuelles ou mentales, parleraient de « dissonances cognitives ».

D’autres citerait le proverbe « nul n’est plus sourd que celui qui ne veut pas entendre ».

Il voit sans voir, il entend sans entendre. Ce qui percutera ou choquera chez une personne ... ne percutera pas chez cette personne, du moment qu’elle est subjuguée et a l’amour de Chimène pour son idéologie, sa religion, son prophète, son gourou (chez qui il ne voit jamais rien de choquant).