Interdire la critique de l’islam est-ce légitime ou bien est-ce le signe du refus du débat démocratique ?

 

Est-il moralement légitime de critiquer l’islam ?

 

Par Benjamin LISAN, le 12/03/2021

1         Introduction

 

Je lisais ce tweet hier :

 

« Critiquer une idéologie politique ou religieuse ne signifie pas qu’on discrimine ou attaque les personnes qui s’en réclament.

Surtout, il est possible de critiquer l’opinion d’un professeur sans forcément lui coller une cible sur le dos.

Il ne mérite pas ce qui lui arrive ».

 

Klaus Kinzler : « Humainement c’est pour moi choquant. Il y a une majorité de mes collègues qui me hait maintenant. Parce qu’à leurs yeux, je traîne l’établissement dans la boue. Alors que c’est moi qui risque ma peau » dans #HDPros https://t.co/AsssNAJig3

 

Selon L'UNEF (de Science Po Grenoble, à l'origine de la polémique), disant réagir aux attaques venant de l’extrême droite appelant à la dissolution du syndicat étudiant, « Des propos que ns considérons comme islamophobes, racistes et réactionnaires ont été tenus par des enseignants. Il est de notre devoir de les dénoncer ».

https://t.co/MtSOxHNC3V

 

Dans un tweet, ce matin, la journaliste, essayiste et réalisatrice française, Caroline Fourest, écrivait :

 

« Il reste une jeunesse qui se bat contre le racisme sans tuer le droit de critiquer les religions et le fanatisme. Merci l’Union des Etudiants Juifs de France [ UEJF ] »

 

 

Note : Sur les deux photos, jointe par Caroline Fourest, à son Tweet, que l'on a du mal à la lire, l’on découvre une image de la couverture du livre du dessinateur satirique et journaliste français, Charb, « Lettre aux escrocs de l'islamophobie qui font le jeu des racistes ».

On rencontre souvent cet argument, chez les militants islamistes, d’extrême-gauche et décoloniaux : « Ceux qui critiquent l’islam sont des racistes d’extrême-droite. En critiquant l’islam, en fait, ces personnes critiques stigmatisent, discriminent l’ensemble des musulmans … ». Même si pourtant cette critique de l’islam provient de la gauche laïque, modérée et républicaine (!).

 

Selon, certains de ces militants « l’islamophobie est condamnée par la loi ». Selon un certain Arié Alimi :

« L'islamophobie est un outil juridique du Conseil de l'Europe et des organisations internationales. Contester le terme c'est contester la légitimité du droit international et européen. #islamophobie

Le droit, rien que le droit, juste le droit. La contestation de la SDN est ce qui a fait sombrer le monde dans le chaos. C'est exactement ce que vous faites en contestant les outils forges par l'ONU et le Conseil de l'Europe #islamophobie ».

(Mais quand on leur demande la preuve de cette affirmation, ils sont incapables de la fournir).

 

Pour certains, être anti-islamistes (anti-islam radical) et anti-burqa ... c'est être anti-musulman(e)s, c'est les discriminer. C'est être "islamophobe".

D’autres acceptent qu’on distinguent islam et islamisme _ l’islamisme n’étant pas l’islam pour eux, mais une perversion de l’islam _,  puis qu’on puisse critiquer l’islamisme, mais pas l’islam (lui intouchable), car étant la religion des opprimés. 

 

Ces dirigeants de L'UNEF sont incapables de justifier, par la loi, leur condamnation de ces deux professeurs de Science Po Grenoble. Au lieu d’être dans le débat d’idées démocratique, ces militants sont dans la condamnation, l’anathème, le slogan, la culture du bannissement. Pour justifier leurs anathèmes, ils n’apportent jamais un argument précis, justifié, vérifié. En plus, ils condamnent a priori, sans lire, sans écouter, sans vérifier la véracité et/ou l’objectivité des arguments des contempteurs de l’islam. Ils n’écoutent pas et ne respectent pas ceux qui ne sont pas d’accord avec eux. Ils sont intolérants.

Ces militants agissants et déterminés, appartenant à des courants minoritaires (décoloniaux, racialistes, gauchistes, islamistes), pourfendeurs de l'islamophobie, recourent constamment à des pantomimes de procès, aux pressions et intimidations, sur l'université et la culture, pour y empêcher le débat démocratique, dans un esprit de meute, avec un goût prononcé pour le lynchage (le bannissement) de leurs "ennemis".

 

On a observé de véritables lynchage pour interdire la publication ou la représentation théâtrale de livres comme :

 

1)      « Lettre aux escrocs de l'islamophobie qui font le jeu des racistes », Charb, Les échappées, 2017.

2)      « Il était une fois l’islam … L’histoire de celui qui voulait diviniser pour mieux régner », Majid Oukacha, 2014, 2017.

3)      « Le fascisme islamique: Une analyse », Hamed Abdel-Samad, Grasset, 2014.

 

Ces militants créent une confusion, un embrouillamini (une mayonnaise) infâme entre racisme _ lui, illégal, aux yeux de la loi _ et le critique de l’islam _, elle, légale, au niveau de la loi (française etc.).

 

Selon Waleed Al-husseini, ex-musulman, « Dans le monde musulman, quand on veut tuer quelqu'un, on l'accuse d'apostasie ou de mécréance. En France, de plus en plus, on utilise l'islamophobie » (tweet du 7 mars 2021).

 

Peut-on ou a-t-on le droit d’affirmer que « l’islam est une religion rétrograde et arriérée », sans être accusé d’être islamophobe, raciste (envers les musulmans) et d’être d’extrême-droite ?

 

2          La critique de l’islam, au 21° siècle, est-elle légitime ?

 

Mes critiques de l’islam sont liés à ces arguments :

 

A)      Dans les pays où l’islam est religion d’état (57 pays) :

 

1)      L’inégalité, au niveau du droit, entre musulmans et non-musulmans, liée à l’interdiction islamique de changer de religion et d’être athée, avec comme corolaire la discrimination et la persécution des apostats, des athées, l’infériorisation et la discrimination des communautés non-musulmanes (chrétiens et juifs) _ bon nombre fuyant les pays musulmans, à cause des persécutions subies.

2)      L’inégalité, au niveau du droit, entre hommes et femmes, ces dernières étant infériorisées, infantilisées, rendues « mineures à vie » par rapport aux hommes (Cf. Code la famille en Algérie, Maroc etc.).

3)      Le sous-développement économique, culturel, scolaire, social, démocratique de la majorité des pays musulmans. Selon un ami algérien, « Aucun pays dit musulman n'est ni stable, ni développé, ni démocratique, surtout pas un exemple à suivre ».

4)      L’échec de toutes les tentatives de réforme de l’islam et du monde musulman et d’élaboration d’une exégèse « libérale » du Coran, depuis la Nahda, la renaissance culturelle arabe moderne, survenue à la fin du 19° siècle [5].

5)      Le monde musulman est malade : Beaucoup des habitants des pays musulmans se sentent humiliés, par rapport à l’Occident, étant le désir de revanche face à lui (à cause de la colonisation occidentale des pays musulmans, de la création de l’état d’Israël, de la guerre en Irak en 2003, sentiment d’humiliation entretenu par, par exemple, Khomeiny, puis Erdogan …), étant dans la frustration permanente (à cause de l’absence de liberté, de distraction pour les jeunes, des interdits sexuels, …), le ressentiment, l’absence de perspective d’avenir (hormis celle du Paradis, promis, par le Coran, aux croyants, aux combattants de l’islam), la jalousie et le rejet de toutes les valeurs de l’Occident (le rejet des droits humains, de l’égalité homme-femme, de la laïcité, du droit à pouvoir changer de religion ou de ne pas en avoir). Pour moi, cette inégalité entre musulmans et non-musulmans, entre hommes et et femmes reste une injustice, au 21° siècle. Malheureusement, il y de puissants courants dans le monde musulman le poussant à s’enfermer et à se couper de l’Occident et de ses valeurs.

6)      En cas de conflit, le Coran, d’une manière générale, ne pousse ni à une paix durable (avec les non-musulmans), ni au compromis (comme c’est le cas dans le conflit israélo-palestinien …), mais au contraire à la guerre totale et à la victoire totale, même si cela doit impliquer l’intransigeance, l’irrédentisme, le fanatisme, le recours aux solutions extrêmes et jusqu’au-boutistes. Même si ce fanatisme, à l’exemple du fanatisme juif des extrémistes juifs (sicaires …), risque de conduire à une catastrophe finale (pour tout le monde, que cela soit pour le monde musulman et pour l’Occident) [jusqu’au-boutisme s’étant déjà exprimé, dans le passé, avec les grands génocides en Inde, au moyen-âge, les grands génocides des chrétiens (arméniens et assyro-chaldéens), à la fin du 19° et au début du 20° siècle …), la guerre totale en Algérie, les génocides larvés des chrétiens, yézidis, avec L’état islamique, Boko Haram, AQMI, Al Qaida (actuellement) …

7)      Les contre-vérités, biais de confirmation (toujours et uniquement à la gloire systématique de l’islam) et dénis sur l’islam, le Coran _ sur ses origines, son histoire etc. _ et Mahomet, dans lesquels s’enferment beaucoup de musulmans, pour refuser certaines vérités et réalités désagréables. Contre-vérités entretenues par le fait qu’il est interdit de critiquer l’islam, le Coran et Mahomet, dans le monde musulman [7].

 

A cause des points, ci-avant, dont les points 4 et 5, je suis très pessimiste sur l’avenir du monde musulman, en accord avec l’analyse d’Adrien Candiard, spécialiste de l’islam, dans son ouvrage « Comprendre l’islam ou plutôt : pourquoi on n’y comprend rien » (Flammarion, 2016) et avec l’analyse d’Henry Laurens, historien, professeur au Collège de France, spécialiste du monde arabe.

Dans cet ouvrage, Adrien Candiard montre bien que la « modernité » pour le monde musulman ne correspond à pas une évolution vers les valeurs occidentales (vers les droits humains, laïcité, l’égalité de tous, l’égalité des femmes et des hommes) mais plutôt vers l’islamisme (comme au travers de la doctrine des frères musulmans etc.) et vers plus d’intolérance.

 

Interrogé en 2015 sur sa vision du conflit israélo-palestinien suite à la parution du Tome 5 de son étude sur la Question de Palestine : la Paix impossible (1982-2001), Henry Laurens répond : « La diplomatie est l'art du possible et nous avons une opposition entre le rationnel et le raisonnable[. L]es acteurs politiques suivront leur rationalité et pas ce qui est raisonnable. Je suis aujourd'hui d'un pessimisme total non seulement sur le conflit israélo-palestinien mais pour l'ensemble de la région. ».

 

Dans le monde musulman, il y a un puissant courant, qui n’est pas que minoritaire, de rejet des valeurs occidentales (de toutes les valeurs humanistes dites « universalistes »), de volonté de victoire totale de l’islam sur l’Occident, jusqu’à sa destruction et à celle d’Israël (jusqu’à ce que « le monde entier soit à Allah » (ou soumis à Allah).

 

Même à notre corps défendant, je crains qu’à cause des facteurs exposés, ci-avant, le conflit entre le monde musulman et l’Occident (avec comme abcès de fixation, le conflit israélo-palestinien) dure encore très longtemps, durant des siècles.

 

Quand un musulman m’affirme :

 

« Cette religion [le vrai islam] depuis mon enfance, c'est la vision [tolérante, laïque] de mon grand-père [imam] qui m'a permis de trouver ma place ici dans le pacte républicain !

Je considère que l'islam peut, dans son esprit, être laïque.

Il a fallu 5 siècles au Christianisme pour le devenir et encore à la marge.

Il n’y a pas que l’islam qui est intolérant et suprémaciste, en son temps, ce fut aussi le cas de l’église catholique : « Hors de l’église, point de salut » ».

 

ð  Je crois qu’il fait preuve d’angélisme (qu’il ne voit pas la réalité du monde musulman).

 

Que cet ami me dise alors que sont devenus les espoirs de démocratisation, lors des « printemps arabes » ? Qu’est devenue la laïcité dans certains pays qui l’avaient mis en place ? Car elle semble régresser actuellement en Turquie et Tunisie.

 

La constitution tunisienne de 2014 semblait garantir la liberté d’expression. Pourtant, l’étudiante et blogueuse tunisienne, Emna Chargui, 27 ans, a été poursuivie depuis le 4 mai par la justice tunisienne pour avoir partagé, le 4 mai, sur son mur Facebook, une publication sur le coronavirus, intitulée « sourate Corona » parodiant le Coran [imitant le style des versets du Coran], puis condamnée à six mois de prison ferme, le mardi 14 juillet, assortis d’une amende de 2 000 dinars (650 €)[1]

 

Que ceux tiennent ce discours, dont mon ami, _ celui de l’islam dit libéral _ m’expliquent pourquoi toutes les tentatives pour faire évoluer l’islam vers l’égalité stricte entre tous (entre musulmans, non-musulmans y compris avec ceux apostats et/ou athées, entre hommes et femmes …), vers plus d’humanisme, ont toujours échoué ? [5].

 

Pourquoi tous ceux qui ont voulu contribuer à cette évolution dans le monde musulmans ont tous été persécutés et/ou tués ? (Car la liste des persécutés pour leurs idées, dans le monde musulmans, est très longue).

 

Quand j’affirme que « l’Islam, le Coran contribuent à ce que le monde musulman n’évolue pas, se sclérose, devienne arriéré et rétrograde », c’est à cause de la persistance des inégalités, exposés ci-avant, de l’absence de liberté de pensée / de conscience, d’expression, dans les pays musulmans.

 

Même s’il y aura, un jour, des astronautes femmes, issues du monde musulman, je ne me contenterais pas de cette avancée.

 

Par exemple, l’égalité homme et femme est inscrite dans la constitution tunisienne de 2014. Or, en 2020, le président tunisien a enterré le projet d’égalité hommes-femmes en matière d’héritage [8].

 

Trouvez-moi un seul pays musulman garantissant la stricte égalité, au niveau du droit, entre hommes et femmes (par exemple, au niveau de l’héritage, de la valeur du témoignage d’une femme face à un homme, dans un procès …) ?

 

Je ne critiquerais plus l’islam quand ces objectifs humanistes, que j’ai cités ci-avant, seront atteints.

 

3         Bibliographie

 

[1] https://maryamnamazie.com/le-droit-de-critiquer-lislam-est-crucial-pour-nous-athees-de-culture-musulmane-lexpress-1-november-2020/

[2] Islamo-gauchisme : quand les censeurs crient à la censure, https://www.revuedesdeuxmondes.fr/islamo-gauchisme-et-universite-quand-les-censeurs-crient-a-la-censure/

La Revue des deux Mondes : « L’islamo-gauchisme moderne est l’expression d’une alliance entre une gauche dévoyée ayant oublié depuis belle lurette que la religion est l’opium du peuple et les nouveaux « opprimés » que constituent à ses yeux les masses musulmanes, nouveau prolétariat fantasmatique. L’incarnation parfaite en fut longtemps le duo Edwy Plenel et Tariq Ramadan, alliance du trotskisme et de l’islam politique des Frères musulmans, trop heureux d’avoir trouvé dans les idiots utiles du gauchisme des amis défendant le totalitarisme islamique, le relativisme culturel et l’abandon de la laïcité et des droits des femmes ».

[3] « L’UNEF veut-elle un nouveau Samuel Paty ? », par Pierre Jourde, https://www.nouvelobs.com/les-chroniques-de-pierre-jourde/20210310.OBS41215/l-unef-veut-elle-un-nouveau-samuel-paty-par-pierre-jourde.amp

[4] Islamo-gauchisme : « Cette gauche européenne qui aime Zarqaoui et déteste Taha Hussein », http://mlouizi.unblog.fr/2021/03/07/cette-gauche-europeenne-qui-aime-zarqaoui-et-deteste-taha-hussein/

[5] L’échec de toutes les tentatives de réforme de l’islam, Benjamin LISAN, le 2/11/2020, 75 pages, http://benjamin.lisan.free.fr/jardin.secret/EcritsPolitiquesetPhilosophiques/SurIslam/echec_de_toutes_les_tentatives_de_reforme_de_l-islam.htm

[6] Henry Laurens : « Je suis aujourd’hui d’un pessimisme total sur le conflit israélo-palestinien et la région », L'Orient-Le Jour, 27 octobre 2015, https://www.lorientlejour.com/article/951732/henry-laurens-je-suis-aujourdhui-dun-pessimisme-total-sur-le-conflit-israelo-palestinien-et-la-region-.html

[7] Le déni des musulmans libéraux, face à la réalité et aux faits, http://benjamin.lisan.free.fr/jardin.secret/EcritsPolitiquesetPhilosophiques/SurIslam/comment_je_vois_l-islam.htm#_Toc48156627

[8] En Tunisie, le président enterre le projet d’égalité hommes-femmes en matière d’héritage, Marie Verdier,  18/08/2020, https://www.la-croix.com/Monde/En-Tunisie-president-enterre-projet-degalite-hommes-femmes-matiere-dheritage-2020-08-18-1201109600

 

Table des matières

1       Introduction. 1

2       La critique de l’islam, au 21° siècle, est-elle légitime ?. 4

3       Bibliographie. 6

 

 

 

 

 

 



[1] En Tunisie, six mois de prison ferme pour une parodie sur le Coran, Lucie Sarr, 15/07/2020, https://www.la-croix.com/Religion/Islam/En-Tunisie-six-mois-prison-ferme-parodie-Coran-2020-07-15-1201104994