Nuées ardentes sur Paris

 

               Depuis très longtemps j’ai rêvé d’observer de près un des plus ultimes phénomène de la nature et de tous les temps que sont les nuées ardentes.

A plusieurs reprises en hiver 98, j’avais été sur le point de prendre, bille en tête, mon sac à dos. Puis un billet Nouvelle Frontière pour la Guadeloupe. Et de là, un ferry pour me rendre à l’île de Monserrat. Cette éruption péléenne commencée il y a presque 3 ans, s’était stabilisée momentanément en une sorte de « régime de croisière »  avec une éruption presque toutes les 8 heures. Et, j’avais l’intime conviction que ce phénomène exceptionnellement rare ne pouvait durer éternellement. Mais des empêchements au niveau professionnels m’ont retenus.

Malheureusement, ma chance a tournée. La chance est comme la volute de vapeur au sommet d’un volcan, changeante. L’éruption semble maintenant s’être arrêtée définitivement au moment où j’écris ces lignes.

Alors dans la disposition d’esprit d’une impossible incomplétude intérieure, je m’étais rendu à la longue nuit de projection du dimanche de l’assemblée générale de l’association vulcanologique Lave. J’avais comme presque unique point focal de toutes mes pensées la projection de diapositive de Patrick Barois, sur l’éruption de Monserrat, perdue dans une longue liste d’autre projections annoncées.

Au début de cette longue nuit, je maugréais d’abord intérieurement comme la longueur du montage diapositive précédent celui de Patrick Barois. Bon Dieu ! me disais-je, y aurait il donc pas un moyen d’accélérer cette première projection ?

Enfin, ma « patience » récompensée, la projection de Patrick commença.

Dès le début, je ne pouvais intérieurement trouver de superlatif. Patrick Barois a employé l’appréciation « C’était à en pleurer ». Elle résume bien ce que l’auditoire ébahi ou stupéfait a pu contempler. En effet, comment décrire ces magnifiques photos prise à un moment où exceptionnellement l’édifice volcanique n’était pas recouvert de son éternel ouate de foehn due aux alizées , ces champignons atomiques, la formidable déploiement des colonnes infernales, ces tapis volants aux effets rouleaux compresseurs que sont les nuées ardentes... Je comprenais pourquoi un 28 mn ne pouvait à peine embrasser l'immense élévation du panache de cendre, d'une hauteur de plus de 10 km.

Je suis ressorti profondément impressionné, voire fortement ébranlé ... tout me semblait sans saveur ensuite.

 

C’est alors que le lendemain au cours d’un rêve, je me retrouvais avec ma mère et mon père. Je contemplais alors des nuées ardentes, dévaler à la vitesse de l'éclair, dans notre direction, dans des rues, que je savais être proches de chez moi à Paris et par une belle journée d’été. Mes parents voulurent fuir. Je leur déclarai très calme et souverain « Pas de problème, j’ai la solution  ! ! ! », avec l’esprit pénétré d’un Myke Gyver, remplis d’astuces.

Et je les faisais alors pénétrer par une petite porte en bois, et le conduisait calmement dans une profonde cave voûtée. Sa fraîcheur contrastait agréablement par rapport à la chaleur de four ambiante extérieure. Et nous attendions la fin de la nuée ardente ... comme on attend la fin d’un orage ... calmement... Ou encore comme le prisonnier Cyparis (?) dans son cachot et le cordonnier sans son échoppe, lors de l’éruption de la montagne Pelée en 1902, dont j’avais repris ici, sans le vouloir, l’histoire.

Quand nous étions ressorti ensuite, la tourmente passée, dans la chaleur de haut fourneau ambiante, tout était devenu blanc beige immaculé. La large rue semblait comme recouverte de plusieurs mètres d’une coulée de neige, glacis parfaitement lisse, aux allures des névés de haute montagne ou comme du sucre glace pulvérulent.

Et hop, à chaque nouvelle nuée ardente, arrivant comme un train au galop, dont nous étions des spectateurs inlassables, nous nous réfugions dans la fraîche cave, sans nous presser, pas inquiet pour deux sous. Ensuite, nous ressortions ébahi de notre cachette pour contempler le résultat du passage de l'avalanche.

Le spectacle était inoubliable .... mais malheureusement il a bien fallu que je me réveille, quittant la salle de spectacle du monde du rêve à grand regret ... car il était temps de repartir une fois de plus pour l’univers du métro boulot dodo.