Une super randonnée au Parc régional de la Montagne de Reims

week-end du 27/8/98 au 28/8/98

 

 

          Nous étions trois : Pierre, Simone et Benjamin, tous membres de l’associations vulcanologique LAVE.

          Pierre nous avais concocté notre randonnée, comme un grand chef cuisinier prépare sa soupe ... « aux petits oignons ».

          Pierre en avait déjà préparés d’autres, en vue de nous aguerrir pour l’ascension de montagnes que sont les volcans en activité, en particulier l’Etna que nous allions revoir tous en septembre prochain.

          Simone, avait effectué un doctorat de 3ème cycle en vulcanologie.  Venant de Nancy, elle devait arriver à la gare d’Epernay. Pierre et moi, venant de Paris par l’autoroute, devions la rejoindre.

          Après 2 heures de route sans problème, nous retrouvons Simone ponctuellement.

          Pierre nous suggère la visite de la cave Mercier. Après avoir tourné plusieurs fois en rond dans la ville, pour trouver ladite cave, les établissements Mercier possédant plusieurs bâtiments dans et autour de la ville, nous arrivons, devant un bâtiment ressemblant plus à un musée moderne qu’à un bâtiment viticole traditionnel.

          Les portes closes s’ouvrent à 9h30. Nous pénétrons dans une salle où trône le plus grand tonneau du monde, constitué de 72 douves, mesurant 5m50 de haut et 6m50, pour un poids de 23 tonnes... construit avec 250 chênes millénaires de Hongrie.

          Nous sommes alors accueillis par des hôtesses en élégant tailleur bleu, visiblement dessinées par un grand couturier, plus proches des hôtesses de l’air, que de guides d’une cave.

Après nous être acquitté des droits d’entrée, nous assistons à un diaporama musical et muet à la gloire du Champagne Mercier.

Après la séance, nous descendons dans un ascenseur, dans un puis de 30 mètres de hauteur. Sur ses parois sont aménagés de petites scènes théâtrales, liées au thème du Champagne, rendues vivantes par des personnages, de cire, animés.

          Au fond du puis, un petit train sur pneu automatique, sans conducteur, guidé par faisceau laser, nous conduit à 3 km/h pendant un kilomètre, à travers le dédale des 18 km de caves.   Une de nos hôtesses de l’air, un joli foulard de soie aux armes de la société Mercier, aussi à l’avant du train, nous commente les diverses scènes défilant devant nos yeux: bouteilles retournées sur des panneaux de bois, bacs agitateurs, cuves stockant des réserves de vins pour le coupage, laboratoire oenologique à la porte farouchement close ...

          A la fin de la visite, on nous offre un verre ... mais pas deux comme le constateront des italiens (!). Simone ne boit pas le sien et me propose de le terminer. Pierre ne buvant pas le sien, notre jolie hôtesse en profite pour déguster discrètement le verre laissé par Pierre.

          Pierre est déçu par ce qu’il considère comme une « snob » et artificielle façon de présenter une cave, loin de l’image traditionnelle qu’il avait connu lors d’une précédente visite, il y une vingtaine d’années.

          Nous reprenons la route vers Louvois.  Après avoir abandonnée notre R5, nous rejoignons vite le GR. Après un dénivelé d’une centaine de mètres, nous atteignons le chemin circulaire, bordant le plateau de la forêt de la Montagne de Reims. Il domine un magnifique panorama de glacis de vignes en pente, à perte de vue, sur une dizaine de kilomètres.

          Sur la carte IGN du Parc, Pierre a signalé de Stabilo jaune tous les points culminant de la « Montagne de Reims » : 270 m, 288 m, 255 m, etc... Est-ce un entraînement en « conditions réelles » pour les Volcans ? A ce un rythme, nous pourrons peut-être escalader toutes les « Montagnes », chacune en presqu’un quart d’heure !

          En bas des coteaux à nos pieds, couverts de vignes prestigieuses des grands crus « Pommery » (100 % nobles), on observent régulièrement des petits villages. Avec le beau temps, de notre point de vue privilégié, le regard porte très loin.

          Nous arrivons le soir à l’observatoire du Mont Sinaï (280 mètres !). Grande déception, pas d’observatoire astronomique ! En fait, et un vaste panorama sur la région, une table d’orientation dont plus de moitié des carreaux de faïences manquent, et un blockhaus en bon état ayant servi, de point d’observation militaire, lors de la première guerre mondiale.

          Plus loin nous découvrons des centaines de petites grenouilles par plus grosses que le petit doigt. Cette forêt totalement vide de promeneurs, raisonne de centaines de chants d’oiseaux, dont certains très étranges et inconnus. Simone parle des chant d’oiseaux comme de notre radio.

          La seule concentration de promeneurs se rencontre dans une zone localisée appelées les faux de Verzy parsemée de hêtres torturés, la plupart recouverts, en cette saison, d’un parasol de feuillage vert sombre, et souvent protégés par un enclos en bois.

          Ils sont les rares survivants d’une variation génétique très rare de hêtre, au taux de reproduction très faible, voire inquiétant, rencontrée qu’à cet endroit en France et dans une autre forêt en Allemagne. Sa plus grande concentration _ 800 exemplaires _ se trouve ici. Il a été mis en place une réserve biologique, pour tenter de les protéger, en particulier du piétinement des passants. Je remarque qu’une partie de la zone a déjà été dévastée par un incendie ancienne et a été transformée en vaste clairière. 

          Puis, nous rencontrons régulièrement des carrières ouvertes dans les flans des coteaux à la lisère de la forêt. A un moment, des pancartes signalent un « sentier des carrières pédagogiques ».

Au fond d’une carrière, que nous atteignons par le sommet, une volumineuse poche d’un roche noirâtre, déjà profondément creusée, en contrebas, contrastant avec le jaune des roches environnantes, nous intrigue. Nous descendons, par des pente d’éboulis, après avoir traversés des champs de prêles, certaines atteignant presque 75 cm.

          Au niveau de la stratigraphie des roches, la limite entre la couche noirâtre et celle constituée sable blanc dit de Fontainebleau juste située au dessus, est très nette.

          Je pense avoir affaire à du marne ou une sorte d’argile.

          En nous approchant du cratère noir creusé dans le sol, je constate que s’il y a beaucoup de boue beige, sur le carreau de mine, mais il y a nulle trace de boue argileuse noire. Au contraire la roche extrêmement friable et non soluble, semble se déliter en fines lamelles noire, comme les blocs de thé comprimés chinois, ayant trempés longtemps dans l’eau.

          J’opte pour de la lignite, sorte de roche resté à un stade antérieur à celui du charbon, qu’on trouve en grande quantité en Allemagne de l’Est. Elle s’est formée, peut-être au début de l’ère secondaire, dans des conditions spéciales, au fond de l’eau, sans oxygène, et en présence de certaines bactéries anaérobies.

          Un panneau à l’entrée de la carrière valide mon intuition.

          Un échantillon ramassé et se désagrégeant dans ma paume dégage une fort odeur de soufre ou de pyrite. L’idée qu’il contient du soufre est confirmée par la présence d’un gros nodule de marcassite, sorte de « pyrite » (sulfure de fer) aux cristaux rayonnants, formant des rognons, rencontrées dans les matériaux sédimentaires (craies, marnes...).

          Pendant le reste de la randonnée, j’ai gardé ce module, d’un kilogramme, qu’on aurait pu confondre avec un rognon de silex, si sa surface n’avait été sillonnée de minuscules aspérités en forme de chevrons aux angles bien nets.

          La carrière semblant bien être actuellement exploitée, je me demande ce que l’on peut bien faire actuellement de ce combustible de mauvaise qualité, assez polluant par  la grande quantité de soufre qu’il renferme et dont l’usage a été presque partout abandonné en Europe.

          Un vigneron rencontré tout près donne tout de suite la réponse : elle permet d’amender les vignes toutes proches : d’apporter du fer dans les terres sableuses et du soufre dans les terres grasses.

          Nous allons au ravitaillement d’eau et déposer notre poubelle au petit village de Mailly.

          Ces petits villages viticoles, regroupant de nombreux petits producteurs de Champagne, n’ont guère de cachet particulier, comme ceux d’Alsace ou de Bourgogne ... peut-être à cause des ravages de la guerre de 14-18. Par contre, ils conservent souvent une très belle église romane.

          L’épicière, ancienne championne cycliste, a une impressionnante collection de trophées, au dessus du comptoir de sa boutique moderne et bien achalandée.

          Pierre nous a promis de nous confectionner un vin chaud alsacien. Ne sachant pas quel vin prendre, j’opte en même temps du vin blanc et du vin rouge (!). Très serviable, l’ancienne championne cycliste nous permet de remplir nos gourdes et une notre vache à eaux, en tout plus de 6 litres, dans son arrière boutique.

          Ensuite, ayant rejoint Pierre gardant nos sac, nous cherchons longtemps notre lieux de bivouac.

          Descendant la carrière, Pierre avait d’abord choisi une étendue plate située au sommet de la carrière. Je lui avais fait alors remarquer que ce terrain sommital dégagé est lieu idéal pour la foudre, lui montrant un arbre carbonisé par la foudre tout proche et le ciel nuageux bien gris devenant de plus en plus menaçant. Simone constate elle que ce terrain artificiellement arasé, est  recouvert d’une terre dure et craquelée pouvant se transformer rapidement en terrain détrempé et boueux. 

          Le bas des différentes carrières n’est guère plus convenable et Pierre refroidit mes espoirs. Partout le sol environnant est terriblement sec pour planter nos tentes et sardines.

          Quant à la maison de gardien désaffectée de la carrière, elle se révèle dangereuse à cause de ses planchers et plafonds effondrées.

          Finalement au fond d’un vallon à la limite d’une vigne et de la forêt, nous découvrons enfin notre carré d’herbe tendre au sol souple. Nous montons rapidement nos tentes.

          Pierre nous réchauffe de son vin chaud parfumé à la cannelle et à l’anis étoilé, avec son super réchaud à alcool suédois. Ce dernier m’a toujours impressionnée par sa géométrie et son pare vent ajouré, système élaboré de ventilation évitant la dispersion de la chaleur.

Le podomètre de Pierre, nous indique 22 km.

          Durant notre dîner, la pluie se met à tomber, d’abord faible, plus de plus en plus forte et orageuse au court de la nuit. Nous entendons au loin les échos techno d’une fête, entrevue au moment d’entrer dans le village, ... certainement un mariage.

          Le matin, l’humidité règne partout, mais un ciel bleu lumineux sans nuage nous accueille.

          Après un déjeuner copieux, où le partage est de règle, et après une toilette de chat, nous coupons à travers la forêt plein sud. Ayant perdu notre chemin, nous passons à zigzaguer d’une vague chemin à un autre tout aussi fantomatique.

          A un moment, descendant rapidement un chemin bien tracé et encaissé, nous rencontrons un randonneur vêtu de la casquette au pantalon de vert de gris. Il nous indique que nous sommes tout proche de Louvois, notre lieu d’arrivée. Il est 11 h du matin et Pierre pense que notre randonnée est trop courte. Nous faisons demi-tour vers le nord.

          Au court de ce trajet nord sud, nous découvrons successivement une petite « cantine », baraque recouverte de plaques de plastique ondulées, contenant des bancs et des tables, puis une énorme mangeoire de maïs, par moment des tours de guets fait d’une longue échelle et d’un banc, apposés sur le tronc d’un arbre. Tout s’explique finalement : nous ne sommes plus dans la forêt domaniale mais dans une forêt privée bordée de panneaux rouges « Interdiction d’entrer ».

          Au sortir, nous débouchons sur une route assez passante. Pierre pense que nous sommes sur la nationale 51. Un cycliste nous renseigne : nous sommes sur la D9, sur la route de Louvois, à quelques km de ce village ! Nous retournons alors de nouveau dans la zone interdite.

          Après avoir louvoyé, suivi longuement les sillons d’un tracteur dans un champ de blé, nous débouchons au hameau de Neuville.

Nous pique-niquons à côté de baraquements et d’engins de chantier et au pieds d’une barrière mobile fermant un chemin forestier, comportant trois panneaux rouge. Un coureur à pied, descendant ce chemin, avisant nos sac à dos, nous dit qu’on peut le remonter mais qu’il est préférable ensuite de rapidement tourner à droite par le « chemin de l’arrosoir », pour revenir dans la forêt domaniale. Par distraction, nous loupons un sentier  herbeux mal entretenu : c’était le bon chemin. Nous continuons dans la zone interdite. Nous traversons une grande zone de coupe devenue immense clairière. A force de tourner à droite désespérément pour rejoindre la forêt domaniale, nous avons l’immense surprise de déboucher sur le même endroit, baraques et barrières, quittées 2 heures auparavant.

          Au niveau orientation, notre copie est à revoir ...!!!

          Il est déjà 15h, le train de Simone étant à 17h17, nous prenons le chemin le plus court de Neuville à Louvois, 2 km, avalés en 20 mn. A Louvois, le podomètre nous indique 20 Km.

          Sur la route d’Epernay, nous arrêtons à côté d’une magnifique église, ayant les dimensions imposantes d’une collégiale, malheureusement fermée.

          Simone nous offre le pot de départ, dans le « café des sport » où des spectateurs expriment vivement leurs émotions devant le petit écran lors de la retransmission du match du mondial France Paraguay. Déjà le signe du retour à la « civilisation ».

          Nous nous quittons à la gare avec beaucoup de regret presque les larmes aux yeux.

          Mais ce n’est que parti remise ... le prochaine randonnée d’une durée 3 jours, est prévue du vendredi 22 août au dimanche 24 août, dans le Luxembourg.