Meta Incognita Peninsula

 

          Combien reste t-il dans le monde de « Terra Incognita » ?

 

          J’ai toujours de découvrir une terre inconnue, une tâche blanche sur les cartes, comme les explorateurs du début du siècles. Et j’ai découvert sur une carte arctique une péninsule nommée « Meta Terra Incognita » (terre quasiment inconnue).

 

          J’avais aimé l’appellation de cette péninsule située tout en bas de la carte de la Terre de Baffin : « Meta Terra icognita Peninsula », terre de l’inconnu, terre lointaine, lieu de mystère ou de quasi-mystère, exerçant son attrait, attirante comme toutes les immensités vierges que l’homme n’aurait pas encore foulé.

 

Qui m’avait poussé si loin sur cette terre ? Une femme ?

 

          Une lointaine souffrance ? Un désir de se prouver à soi-même ? Ou le rêve, quête éperdue, de se dissoudre à jamais dans l’infini des immensités arctiques, aux confins de l’oecumène et du monde connu ?

          J'étais parti au bout de la terre, pour tenir une promesse et en même temps pour l'oublier, ou plutôt pour oublier une femme à qui j'avais fait une promesse insensée.

          Jamais de ma vie, je n’avais été si loin.

 

          Ces pensées défilaient dans ma tête, comme le train de banlieue, qui chaque matin m’emporte, de la Défense à Saint-Quentin.

          Puis sous l’effet du balancement du train, se superposaient et revenaient d’autres images, l’immensité de plaines arides où ne soufflent que le vent et le verbe de Dieu, des lacs immenses, d’un bleu profond, que n’avait encore ridé nulle embarcation, de milliers des caribous silencieux et sages et d’une verte vallée, oasis perdue dans ces terres désolées et pierreuses.

          Les inuits disaient que dans un passé lointain, il avait plu des milliers de cailloux du ciel sur cette île et ces grands plateaux. Légende ou réalité, les noirs cailloux, couverts de lichen, étaient bien là.

          Je me souvenais que j’avais été pris d’une frénésie de recherche d’équipement et en même temps d’un lieu où me perdre , pour aller jusqu’au bout du monde, de moi ou de je ne sais quoi.

          Immensité, vertige, quête d’Absolu. Le souffle planait sur l’immensité. Le souffle du vent soufflant réellement sans retenue, ni barrière. Le souvenir d’un petit refuge en forme d’Igloo, où un homme avait du mal à se tenir debout, arrimé par de gros rochers, tremblant comme un vieux Dakota, freins serrés, sur le point de décoller, sous l’effet de la force irraisonnée de la tempête. Souvenir d’un tempête avec en toile de fond un ciel désespérément bleu.

 

          Seul avec Dieu et moi-même.

 

          Seul avec les rêveries d’un promeneur solitaire et avec pour but et achèvement de la randonnée, le petit village inuit de Kimmirut.

 

          Avais-je été au bout de moi-même ?

 

          Il pleure dans mon cœur, comme les gouttes perlant sur la vitre de mon train à de banlieu. Que de souvenirs peuplent désormais mon cœur. Souvenir de ces inuits, peuples des lointaines contrées arctiques, si chaleureux, souvenir de l’élégance démarche des caribous, frôlant de leur sabots, dans leur trot aérien, la moquette moelleuse de la toundra.

          Durant cette randonnée je pensais à ma muse aux cheveux blonds bouclés comme la laine des moutons de Nouvelle Zélande. Nous devions partir ensemble voir les loups blancs arctiques, sur l’île canadienne de Bathurst, au pôle nord magnétique. L’amour, le rêve, le rêve de l’amour, les loups, les loups de rêve, se conjuguaient. Mais, elle n’est pas venue. L'amitié s'est fanée comme feuille d'automne.

          Plus tard n’est resté que le rêve de ce cheminement commun qui aurait pu être si beau. Une montée absolue vers la beauté éternelle.

 

          Dans cette randonnée solitaire, je revoyais, son visage bouclé comme une icône auréolée d’une mandorle.

          Je m’étais perdu par amour, loin de tout, sans GPS, ni balise de détresse. J'aurais du me perdre à tout jamais. Toutefois j'avais finalement retrouvé mon chemin, par une longue marche élastique et mystique qui me menait d’un bout à l’autre de l’immensité de l’horizon. Dans ces espaces ouverts sans arbre où le regard intérieur comme le regard extérieur portaient loin, mon esprit solitaire s'était envolé, oublieux d'une entorse, se rappelant à mon bon souvenir, depuis cinq jours.

 

          Retournons au premier chapitre de cette histoire.

 

          Nous étions 5 amis qui voulions partir dans l'arctique et qui nous étions rencontrés sur les pentes de volcans siciliens, lors d'un voyage commun.

 

(suite dans quelque temps).