Ce malade dont personne ne veut

 

Il arrive dans certains cas que le/les neurologue(s) d’un hôpital refuse(nt) de voir tel ou tel malade trop connu à leur goût aux urgence de l’hôpital. Cela sera par exemple ce/ces malade(s), (trop) connu(s) aux urgences, se rendant deux ou trois fois aux urgences, exigeant de nouveaux traitements innovants, faisant preuve d’irritabilité, d’énervement, d’impatience etc. Ce malade est constamment fatigué, épuisé. Cela sera celui, par exemple, qui souffre depuis très longtemps (depuis 25 ans ou plus) … avec (ou sur) lequel le(s) médecin(s) a/ont tout essayé : anxiolytiques, antidépresseurs, antiépileptiques, antimigraineux, sans aucun résultat [1]. Et comme on ne sait l’origine de la cause de ses céphalées, c’est le patient qu’on classe alors comme dépressif ou anxieux …

C’est malade peut-être enfermé dans un discours négatif sur les médecins, sur leur indifférence et désintérêt pour son cas.

C’est ce malade chronique faisant désormais parti des murs de l’hôpital, qu’on l’a trop vu aux urgences, celui dont on sourit en se disant qu’il y a plus grave et que c’est peut-être un malade imaginaire.

 

Plus il insiste moins il est pris au sérieux.

A chaque fois qu’il est hospitalisé, le(s) neurologue(s) l’ignore(nt), disant qu’il(s) ne veut/veulent pas le voir  (parce qu’il n’est pas dans le bon service ou sur tout autre prétexte etc. …).

 

A la longue, enfermé dans son histoire sans fin, soit, il se culpabilise, soit arrive chaque fois chez son médecin, défaitiste ou l’attitude d’un chien battu …

 

Or comme l’a montré Marie-Paule Lagrange, dans son ouvrage [2], dans un cas, un malade, pas pris au sérieux, qu’on prenait pour un malade imaginaire, avait été mal diagnostiqué et souffrait réellement. Ce malade souffrait de céphalées par abus médicamenteux, dues à un surdosage de codéine [3]. Il dépassait depuis 25 ans, les doses prescrites d’un médicament codéiné, prenant entre quatre à dix cachets par jours (chaque gélule contenant 1 mg de codéine).

 

Quand l’évidence du fait a été enfin établi, son médecin traitant lui a fait rencontré un neurologue en vue d’un sevrage. « Depuis son sevrage, ce malade est complètement guéri : il n’a plus jamais mal, même pas ses étourdissements au réveil. Sa douleur est au niveau zéro. Il revit ».

 

Si dans son cas, un médecin avait pris le temps de l’écouter, comme l’a fait Madame Lagrange, cet abus médicamenteux aurait pu être diagnostiqué, plus tôt. Bien sûr, certainement, ce malade n’aurait peut-être avoué au départ qu’il dépassait les doses prescrites, mais, malgré tout, beaucoup de temps perdu et de gâchis auraient pu être ainsi évité.

 

 

 

 

 



[1] Tous ces médicaments n’ayant aucun effet sur ses céphalées.

[2]  Marie-Paule Lagrange, Maux de tête chroniques. Comment les soigner, Ed. Ellébore, 2004, pages 59 à 63.

[3] Ce malade a commencé à prendre des médicaments codéinés suite aux complications douloureuses d’un radiculographie et probablement d’un mal de dos qui avait justifié cette radiculographie, il y a 25 ans.